Le champion catalan vient de relancer un débat qui agite la communauté du trail running depuis plusieurs années. Dans ses récentes déclarations, Kilian Jornet s’est prononcé fermement contre l’évolution actuelle de l’assistance en course, appelant à un retour vers plus d’autonomie pour les coureurs. Cette prise de position, loin d’être anodine, divise déjà les passionnés et pourrait influencer l’avenir réglementaire de la discipline.
Habitué aux prises de position tranchées, l’athlète espagnol ne mâche pas ses mots face à ce qu’il perçoit comme une dérive logistique du trail moderne. Sa vision puriste de la discipline questionne directement les pratiques actuelles du haut niveau et interroge sur l’essence même de cette pratique sportive.
Sommaire
Qu’est-ce que l’assistance en trail ?
Les différentes formes d’aide autorisées
L’assistance en trail englobe plusieurs types de soutien apportés aux coureurs sur des points précis du parcours. Cette aide peut prendre diverses formes selon les besoins et les règlements spécifiques de chaque épreuve. Le ravitaillement personnalisé constitue l’aspect le plus visible, permettant aux athlètes de retrouver leurs produits énergétiques habituels plutôt que de dépendre uniquement des ravitaillements officiels.
Le changement de matériel représente un autre volet crucial de l’assistance moderne. Les coureurs peuvent ainsi adapter leur équipement aux conditions météorologiques évolutives ou remplacer des chaussures usées lors d’épreuves particulièrement longues. Cette flexibilité matérielle peut s’avérer déterminante sur des courses dépassant les vingt-quatre heures d’effort.
Encadrement réglementaire strict
Contrairement aux idées reçues, l’assistance n’est pas libre de s’exercer n’importe où sur un parcours. Les zones d’assistance autorisées sont strictement définies par l’organisation de chaque course, généralement situées aux ravitaillements officiels ou sur des secteurs spécifiquement délimités.
Toute aide apportée en dehors de ces zones expose le coureur à des sanctions pouvant aller de la pénalité temporelle jusqu’à la disqualification pure et simple. Cette réglementation vise à maintenir un semblant d’équité entre les participants, bien que son application reste parfois difficile à contrôler sur de longs parcours montagneux.
Le point de vue de Kilian Jornet sur l’assistance

Une remise en cause fondamentale
Dans ses dernières déclarations publiques, Kilian Jornet estime que l’assistance a pris trop de place dans certaines compétitions contemporaines. Sa critique porte sur une évolution qu’il juge contraire à l’esprit originel du trail, où l’autonomie constituait une valeur cardinale de la discipline.
« L’essence du trail, c’est de savoir se débrouiller seul en montagne. Aujourd’hui, certaines courses se transforment en opérations logistiques géantes. Cela change la nature même de l’effort. »
Cette déclaration révèle une vision puriste du trail running, où la capacité d’adaptation et la gestion personnelle des ressources primeraient sur l’optimisation logistique. Pour le champion espagnol, cette évolution dénature progressivement l’ADN de la discipline.
Arguments en faveur de l’autonomie
L’athlète catalan développe une argumentation à trois niveaux pour justifier sa position. L’équité sportive constitue son premier argument, soulignant l’avantage considérable dont bénéficient les coureurs disposant d’équipes expérimentées par rapport aux participants moins bien entourés financièrement.
L’impact environnemental représente sa deuxième préoccupation majeure. Limiter l’assistance permettrait de réduire significativement les déplacements en voiture des équipes de soutien, souvent nombreuses sur les grandes épreuves internationales. Cette dimension écologique s’inscrit dans la sensibilité environnementale croissante du milieu outdoor.
Son troisième pilier argumentaire touche au retour à l’esprit originel du trail. Jornet considère que la discipline doit conserver sa dimension d’aventure et de gestion personnelle, valeurs qu’il estime menacées par la professionnalisation logistique actuelle.
Exemples de formats plus autonomes

Les pionniers de l’autonomie contrainte
Plusieurs épreuves ont déjà adopté des approches restrictives concernant l’assistance, offrant des modèles inspirants pour l’évolution future de la discipline. La Diagonale des Fous, organisée sur l’île de La Réunion, limite drastiquement les possibilités d’aide extérieure et privilégie les ravitaillements gérés par l’organisation.
Le Tor des Géants italien impose une gestion autonome du matériel et de l’alimentation sur des sections particulièrement longues. Cette contrainte oblige les participants à développer des stratégies d’anticipation et de gestion des ressources particulièrement sophistiquées.

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⚡ Voir les nouveautés i-RunL’exemple nord-américain
Les courses nord-américaines comme la Hardrock 100 ont établi des règles strictement limitatives concernant les zones d’assistance autorisées. Ce modèle valorise la capacité du coureur à anticiper ses besoins et à gérer l’imprévu sans soutien extérieur permanent.
Ces formats encouragent le développement de compétences spécifiques liées à l’autonomie en montagne, rapprochant ainsi le trail de ses racines alpinistiques et aventurières. Les participants doivent maîtriser l’art de la préparation et de l’adaptation permanente aux conditions rencontrées.
Un débat ancien mais ravivé
Professionnalisation contre authenticité
La question de l’assistance cristallise depuis plusieurs années une tension fondamentale entre professionnalisation logistique et authenticité sportive. Certains puristes dénoncent une évolution où le succès dépendrait presque autant de l’équipe d’assistance que des qualités intrinsèques du coureur.
À l’inverse, les défenseurs de l’assistance considèrent qu’elle fait partie intégrante du haut niveau moderne. Dans des courses où chaque minute peut faire la différence, l’optimisation des transitions et de l’alimentation grâce à une équipe dédiée devient un élément stratégique légitime.
La paradoxe Jornet
L’intervention du champion catalan interpelle d’autant plus qu’il fait partie des athlètes les mieux équipés et les plus entourés lors des grandes courses internationales. Cette apparente contradiction n’échappe pas à ses détracteurs, qui y voient une forme d’hypocrisie ou, à tout le moins, une prise de conscience tardive.
Néanmoins, cette remise en question personnelle du système pourrait témoigner d’une maturité réflexive et d’une volonté sincère de préserver l’essence de la discipline qu’il a contribué à populariser mondialement.
Les réactions de la communauté trail
Clivage prévisible mais instructif
Comme souvent avec les prises de parole de Kilian Jornet, la communauté trail s’est immédiatement divisée en deux camps aux arguments bien tranchés. Les partisans saluent un discours cohérent avec l’esprit montagne et soulignent qu’une limitation de l’assistance rendrait effectivement la compétition plus équitable.
Les opposants estiment qu’il est facile pour un champion déjà reconnu de prôner l’autonomie, alors que pour beaucoup d’athlètes en devenir, l’assistance reste indispensable pour terminer dans de bonnes conditions et progresser vers le haut niveau.
Préoccupations sécuritaires légitimes
Sur les réseaux sociaux, certains participants rappellent que de nombreuses courses populaires ne pourraient pas garantir un tel niveau d’autonomie à tous les coureurs, notamment pour des raisons de sécurité. Cette dimension sécuritaire constitue un enjeu majeur pour les organisateurs, particulièrement sur les épreuves accueillant des coureurs de niveaux très hétérogènes.
La question de la responsabilité légale des organisateurs face à des participants moins expérimentés complique également la mise en œuvre généralisée de formats plus autonomes.
Vers une évolution des règles ?
Réflexions institutionnelles en cours
La Fédération internationale de skyrunning et certaines organisations locales réfléchissent déjà à des mesures limitant l’assistance. Ces réflexions pourraient aboutir à une réduction du nombre de points d’assistance autorisés ou à l’imposition d’un matériel obligatoire plus complet.
L’introduction de sections « no assistance » pour tester la capacité d’autonomie des participants représente une voie médiane intéressante. Cette approche permettrait de préserver l’équilibre entre sécurité, équité et respect de l’esprit originel du trail.
Impact sur la préparation des athlètes
Si ces mesures venaient à se généraliser, elles modifieraient profondément la préparation des athlètes, leur stratégie de course et même l’ambiance des grands événements. Les coureurs devraient développer de nouvelles compétences liées à la gestion autonome de leurs ressources et à l’adaptation permanente.
Cette évolution pourrait également redistribuer les cartes au niveau mondial, favorisant les athlètes issus de cultures montagnards traditionnelles, habitués à l’autonomie en milieu naturel, par rapport aux produits du système de formation moderne ultra-encadré.
Quentin, 26 ans, passionné de trail : suivez mes aventures au cœur des sentiers, entre défis sportifs et communion avec la nature.