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Strava Jockey :  » On m’a proposé de l’argent pour courir à ma place  » 

Les « Strava jockeys », ces athlètes qui vendent leurs kilomètres à des inconnus désireux d’embellir leur profil sportif, redéfinissent les contours de l’authenticité dans le sport. Révélée au grand jour, cette tendance née à Djakarta s’est rapidement propagée jusqu’en Europe, touchant même l’Hexagone.

Le concept? Simple comme bonjour: vous payez, ils transpirent à votre place. Strava, application de référence pour plus de 100 millions de sportifs à travers le monde, se retrouve ainsi détournée de sa vocation première.

Au lieu d’encourager l’effort personnel, elle devient pour certains le théâtre d’une mise en scène virtuelle de leurs exploits… par procuration. Cette dérive, symptomatique de notre époque où l’image prime souvent sur l’authenticité, pose d’épineuses questions sur notre rapport au sport, à la performance et à l’estime de soi. Plongeons ensemble dans les méandres de cette économie parallèle du kilomètre, où la sueur se monnaie et où les performances s’achètent à prix d’or. Un phénomène qui, bien au-delà de la simple anecdote, révèle les paradoxes d’une société où paraître sportif importe parfois davantage qu’être véritablement en forme.

Aux origines du « strava jockeying » : de Djakarta aux rues européennes

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Tout a commencé dans les rues inondées de Djakarta, métropole indonésienne régulièrement submergée pendant la saison des pluies. C’est dans ce décor presque apocalyptique que les premiers « coureurs à gages » ont fait leur apparition.

De jeunes sportifs, souvent issus de milieux modestes, ont flairé l’opportunité de transformer leur passion pour la course en source de revenus. Le marché s’est structuré autour d’une logique implacable: les riches utilisateurs de Strava, trop occupés ou peu enclins à l’effort physique, paient ces jeunes gens pour accumuler des kilomètres sous leur identité numérique. La rétribution? Quelques centimes par kilomètre parcouru, avec un barème qui varie selon la vitesse – une modalité qui ajoute à la déshumanisation de cette relation marchande.

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L’expansion fulgurante d’une pratique contestable

Ce qui n’était initialement qu’une pratique locale s’est propagé comme une traînée de poudre. Le concept a traversé les océans pour s’implanter fermement en Europe. Sur le sol britannique, les tarifs ont considérablement augmenté: 30 euros pour la course à pied et 12 euros pour le cyclisme.

Une inflation qui témoigne de la rentabilité du business et de l’appétit grandissant pour ce service. L’anecdote de sa naissance occidentale mérite d’être contée: c’est un utilisateur facétieux de X (anciennement Twitter) qui, sur le ton de la plaisanterie, a proposé ses « services de Strava jockey ». Face à l’avalanche de demandes sérieuses reçues, ce qui n’était qu’une boutade s’est transformé en véritable marché.

Le profil type du strava jockey : entre opportunisme et précarité

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Qui sont ces individus prêts à braver les intempéries, à user leurs semelles pour garnir le profil Strava d’autrui? Le portrait-robot du strava jockey esquisse les contours d’une jeunesse sportive en quête de revenus complémentaires.

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À Djakarta, ils appartiennent généralement à la classe ouvrière, pour qui chaque source de revenu compte. L’un d’eux, s’exprimant sur une chaîne télévisée indonésienne, résume parfaitement leur état d’esprit: « Mon passe-temps est de courir, alors j’ai pensé que je devrais profiter de la situation et en faire un business. » Cette déclaration candide illustre la rencontre entre passion sportive et opportunisme économique.

La motivation financière derrière l’effort physique

Les tarifs pratiqués varient considérablement selon les régions. En Indonésie, la course se négocie à quelques centimes par kilomètre, tandis qu’en Europe, les prix grimpent significativement. Cette disparité reflète les écarts de niveau de vie entre ces territoires, mais aussi la valorisation différente accordée à ce service. Fait particulièrement cynique, la rémunération s’ajuste souvent en fonction du rythme maintenu. Plus la vitesse est élevée, plus la rétribution augmente. Un système de prime à la performance qui transforme l’effort physique en véritable travail à la pièce, soumis aux lois impitoyables du rendement.

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La mécanique du faux exploit : comment fonctionne concrètement la supercherie

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L’astuce technique derrière cette imposture numérique se révèle d’une simplicité déconcertante. Une fois la course terminée, le « jockey » exporte le fichier de données généré par son propre appareil (montre connectée ou smartphone) et le transmet à son client.

Ce dernier n’a plus qu’à l’importer sur son compte Strava pour s’attribuer l’effort. La beauté perfide de ce stratagème réside dans sa quasi-indétectabilité. Comme le souligne l’article de L’Équipe, « il est extrêmement difficile de falsifier une course » car les variations de vitesse demeurent naturelles et imprévisibles, contrairement à une simulation générée par ordinateur qui présenterait des régularités suspectes.

Les plateformes de mise en relation entre clients et « jockeys »

Le réseau social X (ex-Twitter) s’est imposé comme la place de marché privilégiée pour cette économie parallèle. Des comptes dédiés y fleurissent, proposant leurs services avec un marketing parfois sophistiqué. Parmi eux, un Français opérant sous le pseudonyme @strava_jockey qui se présente comme « un jeune coureur aguerri qui a plus de 5 000 km à son actif » et dont la bio clame: « Je cours pour vous, vos stats s’envolent. » Cette ubérisation de l’effort physique épouse parfaitement les contours du capitalisme de plateforme. Elle en reprend les codes: mise en relation directe, tarification à la tâche, flexibilité totale. Seule différence notable: le produit vendu est ici une imposture numérique, un trompe-l’œil sportif.

Les motivations psychologiques des acheteurs de kilomètres

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Pourquoi certains sont-ils prêts à débourser des sommes parfois conséquentes pour afficher des performances qui ne sont pas les leurs? La réponse puise dans les tréfonds de la psychologie humaine et notre rapport complexe aux réseaux sociaux.

Pour beaucoup, Strava n’est plus simplement un outil de suivi d’entraînement, mais une vitrine sociale où s’expose la version idéalisée de soi-même. Dans cette logique, payer pour paraître sportif devient un investissement dans son capital symbolique, une forme de construction identitaire par procuration.

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La pression sociale des réseaux sportifs connectés

L’avènement des applications de fitness a engendré une forme inédite de compétition permanente. Les classements, les badges, les comparaisons de performances créent une pression constante qui pousse certains utilisateurs vers ces solutions de facilité. Comme le suggère un internaute cité dans l’article, cette pratique révèle une pathologie plus profonde: la déconnexion croissante entre l’identité réelle et l’identité numérique. La tendance à valoriser l’apparence de performance plutôt que l’effort authentique traduit un malaise contemporain où l’image prime sur l’essence.

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