L’abandon de Vincent Bouillard au 128ème kilomètre de la Western States 2025 fait l’effet d’une douche froide sur le trail français. Attendu dans le top 5 après sa victoire spectaculaire à l’UTMB 2024, le coureur de 31 ans a quitté la course visage cireux et regard absent dans la montée de Green Gate. Une défaillance qui interroge sur son véritable niveau international.
Sommaire
Le crash d’un favori annoncé
Des espoirs démesurés face à la réalité
Depuis sa victoire surprise à l’UTMB 2024, Vincent Bouillard était devenu l’espoir français du trail mondial. Sa deuxième place à la Diagonale des Fous 2023 et sa troisième place au Chianti Ultra 2025 avaient alimenté l’enthousiasme général. Pourtant, cette Western States 2025 vient brutalement rappeler que le talent ne suffit pas toujours.
Le Français avait pourtant pris ses précautions, passant trois semaines sur place pour s’acclimater aux conditions californiennes. Mais entre la théorie et la pratique, l’écart s’est révélé insurmontable. Dès les premiers kilomètres, Bouillard accusait un retard significatif sur le rythme imposé par Caleb Olson et Chris Myers.
L’erreur fatale dans la descente
Pointant encore 13ème à Foresthill (kilomètre 100), Bouillard restait dans la course pour un top 10 honorable. Mais c’est dans la descente vers la rivière que tout a basculé. Tentant de combler son retard croissant, le Français a explosé ses quadriceps dans une relance désespérée.
Cette décision tactique catastrophique l’a conduit directement vers l’abandon. Arrivé au gué de Rucky Chucky déjà entamé physiquement, il a ensuite affronté la remontée vers Green Gate dans un état second. Les témoins décrivent un coureur méconnaissable, incapable de s’alimenter et pris de vertiges.
Un profil inadapté au terrain californien
Le grimpeur face au rouleur
Vincent Bouillard excelle sur les parcours alpins techniques où ses qualités de grimpeur et sa résistance aux longues descentes pierreuses font merveille. La Western States représente exactement l’opposé : 70% de sentiers quasi-routiers, des descentes rapides et fluides, une chaleur écrasante dans les canyons.
Cette inadéquation était prévisible mais sous-estimée. Alors qu’Olson et Myers maintenaient une cadence proche de 8 minutes par kilomètre, Bouillard peinait à descendre sous les 8 minutes 30. Ce différentiel, apparemment minime, l’a contraint à des relances incessantes qui ont grignoté ses réserves.
La chaleur, ennemi numéro un
Habitué à l’humidité alpine de l’UTMB, le Français a découvert la chaleur sèche de la Sierra Nevada avec ses 45°C à l’ombre. Malgré trois semaines d’acclimatation, son organisme n’a jamais réussi à s’adapter complètement à ces conditions extrêmes.
Cette défaillance thermorégulatrice explique en grande partie son effondrement. Quand le mercure grimpe au-delà de 40°C, seuls les coureurs parfaitement adaptés peuvent maintenir leur niveau. Bouillard a payé cash son manque d’expérience sur ce type de terrain.
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Les signaux d’alarme ignorés
Dans son interview accordée à 20 Minutes la veille du départ, Vincent Bouillard avait pourtant exprimé ses doutes. Il reconnaissait « y aller encore plus avec la casquette de débutant » et redoutait ouvertement la chaleur californienne. Cette lucidité n’a malheureusement pas suffi à éviter l’écueil.
Avec seulement deux 100 miles au compteur avant cette Western States, le Français manquait cruellement d’expérience sur la distance. Cette lacune, combinée à son inexpérience du terrain rapide et poussiéreux, a créé un cocktail explosif qui a fini par exploser au 128ème kilomètre.
La leçon du podium
Pour mesurer le chemin qui reste à parcourir, il suffit d’observer le trio vainqueur. Caleb Olson, 29 ans, s’entraîne régulièrement sur tapis chauffé pour s’habituer à la canicule. Chris Myers, ex-coureur de piste, développe une capacité exceptionnelle à tenir trois heures au seuil sur terrain roulant.
Quant à Kilian Jornet, sa maîtrise du pacing et son travail systématique de descente longue font la différence. Quinze ans d’expérience au plus haut niveau lui permettent d’affiner sa nutrition et sa gestion d’effort avec une précision chirurgicale.
« Il avait conscience de la difficulté ; il avait même passé trois semaines sur place pour s’acclimater. Mais adapter son entraînement sur le papier et survivre à 45°C dans les canyons sont deux réalités bien différentes. »
Un niveau à relativiser
Le champion reste présent
Faut-il pour autant conclure que Vincent Bouillard n’a pas le niveau international ? Certainement pas. Sa saison 2024-2025 prouve qu’il figure parmi les grimpeurs les plus solides du circuit mondial. Ses victoires à l’UTMB et au Kodiak Ultra Marathon témoignent d’un talent indéniable.
Cet abandon rappelle simplement qu’un champion doit adapter son entraînement au profil spécifique de chaque course. Vitesse soutenue, sessions canicule, descentes longues à cadence constante : autant de leviers que Bouillard devra intégrer pour transformer son talent de montagnard en prétendant universel.
L’apprentissage nécessaire
Cette défaillance s’inscrit dans un processus d’apprentissage normal pour un athlète encore jeune dans sa carrière internationale. Les plus grands champions ont tous connu des échecs retentissants avant de s’imposer définitivement.
L’important sera la capacité de Bouillard à tirer les enseignements de cet abandon. Revoir sa préparation spécifique, développer sa résistance à la chaleur, améliorer sa gestion tactique : autant de chantiers qui l’attendent pour revenir plus fort.
Quentin, 26 ans, passionné de trail : suivez mes aventures au cœur des sentiers, entre défis sportifs et communion avec la nature.
