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Histoire de Decathlon X Kiprun :

Fondée le 27 juillet 1976 par Michel Leclercq dans la zone commerciale d’Englos-les-Géants près de Lille, Decathlon incarne l’une des plus belles réussites entrepreneuriales françaises. De ce premier magasin de 1 500 m² aux 1 749 points de vente répartis dans 78 pays aujourd’hui, l’entreprise nordiste a révolutionné la distribution d’articles de sport en démocratisant l’accès au matériel sportif pour tous.

Les origines

L’aventure Decathlon naît de l’audace d’un jeune homme de 37 ans qui refuse la voie toute tracée. Michel Leclercq, ancien boucher chez Auchan dirigé par son cousin Gérard Mulliez, abandonne ses études d’ingénieur en 1962 pour se consacrer au commerce. Après treize années passées aux achats et à l’informatique d’Auchan, il préfère créer sa propre entreprise plutôt que d’accepter une nouvelle mission.

L’inspiration vient d’un voyage aux États-Unis où il découvre le concept de grande surface spécialisée dans le sport. Le 26 juillet 1976, il ouvre un magasin révolutionnaire : vendre sous un même toit tous les articles de sport en libre-service au meilleur prix, du débutant au passionné. Le nom « Decathlon » reflète cette ambition de couvrir toutes les disciplines sportives.

Les débuts sont difficiles. Les grands équipementiers refusent de livrer cette enseigne inconnue. Intersport-La Hutte et Techniciens du Sport ferment leurs centrales d’achat, Sport 2000 se rétracte sous la pression. Avec un magasin « à moitié vide », Michel Leclercq pense que Decathlon ne passera pas l’hiver 1976. C’est une plainte pour refus de vente contre Adidas qui débloquerait finalement la situation, obligeant les fournisseurs à livrer l’entreprise.

L’expansion française et les premières innovations

Les années 1980 marquent le décollage de l’enseigne. En 1986, Decathlon Production voit le jour avec une mission révolutionnaire : concevoir et fabriquer ses propres articles. Cette intégration verticale constitue le premier avantage concurrentiel décisif de l’entreprise. La même année, l’internationalisation commence avec l’ouverture du premier magasin allemand à Dortmund.

Dès 1988, Olivier Leclercq, fils du fondateur, ouvre le premier bureau de production en Asie, anticipant de quinze ans la mondialisation de la production textile. Cette vision stratégique permettra à Decathlon de proposer des prix imbattables tout en contrôlant la qualité de ses produits.

La révolution des marques passion

Les années 1990 consacrent la mutation de Decathlon en concepteur-producteur. En 1996, l’entreprise crée ses deux premières « marques passion » : Tribord pour les sports aquatiques et Quechua pour la montagne. Cette stratégie de marques spécialisées par univers sportif représente une rupture majeure dans la distribution sportive.

Quechua s’installe à Domancy « au Pays du Mont-Blanc » en 1999, Tribord à Hendaye au bord de l’océan Atlantique en 2004. Cette proximité géographique avec les terrains de pratique permet aux équipes de conception de développer des produits en prise directe avec les besoins des utilisateurs.

L’expansion internationale

L’internationalisation s’accélère dans les années 2000. En 2003, Matthieu Leclercq ouvre le premier magasin chinois à Shanghai, anticipant l’émergence du marché asiatique. Cette implantation en Chine, aujourd’hui forte de 169 magasins, illustre la capacité de Decathlon à identifier les marchés porteurs.

L’entreprise teste également les marchés mûrs comme les États-Unis dès 1999, mais se retire en 2006 face à une concurrence établie. Cette expérience américaine, bien qu’infructueuse, enrichit l’approche internationale de l’enseigne qui concentre désormais ses efforts sur les pays émergents et les marchés européens.

L’ère Oxylane

En 2008, le groupe Decathlon devient Oxylane, reflétant sa transformation en écosystème sportif diversifié. Cette période voit l’émergence de nouvelles enseignes : Decathlon City, Decathlon Village, Chullanka, ou encore l’acquisition de sites e-commerce spécialisés.

Olivier Leclercq succède à son père à la présidence en 2009, avant de céder la place à son frère Matthieu en 2012. Cette transmission familiale assure la continuité stratégique tout en apportant de nouvelles expertises, notamment sur les marchés asiatiques pour Olivier et la digitalisation pour Matthieu.

Le retour aux sources : 2014-2022

En 2014, Oxylane reprend le nom Decathlon, reconnaissant la force de cette marque historique. Michel Aballea devient directeur général en 2015, pilotant une croissance accélérée avec 140 ouvertures à l’étranger dont 51 en Chine.

Cette période voit l’émergence de concepts innovants comme Decathlon Mobility en gare de Lille-Flandres ou le projet Alive by Decathlon à Villeneuve-d’Ascq. L’entreprise teste également des formats révolutionnaires comme le magasin « Osons » sans stock, préfigurant le commerce phygital.

La crise Covid révèle l’agilité de Decathlon qui transforme ses masques de snorkeling Easybreath en équipements de protection pour le personnel hospitalier, démontrant sa capacité d’adaptation et son engagement sociétal.

La transformation moderne : 2022-2025

L’arrivée de Barbara Martin Coppola comme directrice générale en mars 2022 marque une rupture. Cette ancienne dirigeante d’Ikea, première externe au groupe Mulliez à diriger Decathlon, impulse une transformation radicale : réduction du nombre de marques de 49 à 13, nouvelle identité graphique avec le logo « orbite » et slogan « Ready to play ».

Le sponsoring des Jeux olympiques de Paris 2024 consacre l’ambition mondiale de Decathlon. L’entreprise équipe 45 000 bénévoles et sponsorise des athlètes comme Teddy Riner et Antoine Griezmann, confirmant sa stature internationale.

Cependant, cette transformation managériale crée des tensions. Les polémiques autour du versement d’un milliard d’euros de dividendes à la famille Mulliez fin 2024, contrastant avec les difficultés d’Auchan, provoquent des grèves et questionnent la gouvernance familiale.

L’héritage et les défis contemporains

En mars 2025, le départ de Barbara Martin Coppola et son remplacement par Javier Lopez, « Decathlonien historique », ainsi que la nomination de Julien Leclercq comme président, marquent un retour aux valeurs familiales et managériales traditionnelles de l’entreprise.

Avec 15,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023 et 931 millions d’euros de résultat net, Decathlon domine largement le marché français avec 92,8% de parts de marché selon le ministère de l’Économie. Cette position hégémonique suscite débats et critiques, notamment concernant l’impact sur les commerces indépendants et les conditions de production en Asie.